Accueil L’oulipien de l’année Il se penche il voudrait attraper sa valise
C’est un homme dont le corps se penche

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c’est un homme dont le corps se penche
il se penche il voudrait attraper sa valise
comme un arbre mort, il tend les branches
que convoitait c’est sûr une horde d’escrocs
mais le froid est là, la neige est blanche
il se penche et alors à sa grande surprise
la neige est blanche
il ne trouve aussi sec qu’un sac de vieux fayots
le froid est là, la neige est blanche
on vous fait devenir une orde marchandise

toi qui nous quittes pour ce pays-là
qui se plaît à flouer de pauvres provinciaux
où tu dis que les gens sont beaux

de la mort on vous greffe une orde bâtardise
que veux-tu de plus que tu n’as pas ?

la mite a grignoté tissus os et rideaux
que veux-tu de plus que tu n’as pas ?
devant la boue urbaine on retrousse sa cotte

c’est un homme dont le corps se penche
le lâche peut arguer de sa mine pâlotte
comme un arbre mort, il tend les branches
lorsqu’il voit la gadoue il cherche le purin
mais le froid est là, la neige est blanche
on regrette à la fin les agrestes bicoques
mais le froid est là, la neige est blanche
on mettait sans façon ses plus infectes loques
la neige est blanche
l’écu de vair ou d’or ne dure qu’un matin

Gérard-Aymon Quenet-Manceau


Hybridation du sonnet de Raymond Queneau et de La neige est blanche de Gérard Manset.