Les dessins que nous avons regardés, n’allez surtout pas croire, lecteur, qu’ils soient devenus pur néant. Bien au contraire, ils sont inscrits dans la mémoire universelle. Ils existent dans les bibliothèques, dans les journaux, et surtout dans la protestation de nombre de vivants. Mais il y a autour d’eux tant de bavardage impudent, ils sont pris dans une telle surabondance de discours officiels pompeux, que moi-même à vrai dire, malgré tous mes efforts, je peine à les reconnaître. La place publique me paraît envahie des célébrations rituelles des pouvoirs établis, ce qui fait de mon travail une longue traque, la recherche têtue de tous ces éclats de rire dérobés à nos consciences.

Marie Bell, Pourquoi j’ai besoin de vos dessins, Libres crayons 2015.