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À supposer la nuit

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À supposer que vous me demandiez ici ce que nous ne pourrions plus voir ayant allumé le feu - le feu non métaphorique mais au sens de flamme en train de réduire du bois en braise -, j’invoquerais d’abord le pouvoir hypnotiseur de toute ignition, au degré de négliger le ciel, eût-il chassé ses nuages pour nous et fixé au plafond ses punaises de cuivre avec une lune élégante en arrondi d’ongle soigné (bien sûr il n’en ferait que plus frisquet mais aurait-on conscience de respirer et s’aérer, se sentirait-on en vacances et en camp de vacances ?), lors ayant balayé l’objection d’une mer absente et désigné la voûte comme image plutôt réussie de l’infinitude, je conjecturerais aussi durable que soudain notre beau congé, je pointerais du doigt quelque étoile brillante bien qu’elle n’existât plus s’il faut en croire les affaires de la lumière et, de retour à ce que le feu rend invisible, je dirais : la nuit...

« À supposer... » : phrase paragraphe, forme inventée par Jacques Jouet.