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Il a suffi de quatre mètres

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Malgré elle, un fantassin balançait à toute volée sur une escarpolette Mlle Laveline, de Nancy. Chute mortelle de 4 mètres.

4 mètres il a suffi de 4 mètres, c’est peu, c’est rien, c’est juste la distance entre la porte et le portail, entre le robinet et le seau, parfois, entre le four et le comptoir, 4 petits mètres qui m’ont fait passer de vie à trépas.
Il était beau le fantassin dans son uniforme impeccable, il était agile et facétieux à m’entraîner ainsi jusqu’aux manèges. D’abord, j’ai dit oui, soleil, odeur de la barbe à papa, on n’y résiste pas, d’abord, mais j’ai cru voir, sur son visage des ombres curieuses, voilant son sourire parfois, ce visage un mystère, un masque on aurait dit, mais… ben oui ? l’odeur de la barbe à papa, les cris des enfants sur les chevaux de bois, allons beau fantassin, emmène moi, emporte moi, oublie tes chagrins et viens, prends ma main et que vole l’escarpolette à toucher les étoiles et le firmament, enfin pas trop quand même, oui, là, ça va, j’ai mal au cœur, arrête, veux-tu, je n’en peux plus et lui de rire et moi, de peur, je pleure et une poussée encore et je décolle, je vole et m’écrase, me fracasse, me disloque, m’écrabouille à 4 mètres et il en est fini de moi… c’est bête !!!

Dilatation d’une nouvelle en trois lignes de Félix Fénéon.