Accueil L’oulipien de l’année Fondu au noir
Ô récit banal / ce bât-là noir

Page précédente Page suivante

L’anecdote est banale, s’il faut le reconnaître. Mais l’astuce de la raconter à l’envers, en commençant par présenter la fin, comme pour revivre un film projeté « à rebours », contredit cette vague banalité si lisse, si prévue et si dépassée. Elle la dément, pourquoi pas, en nous montrant à contre-jour, d’un point de vue nouveau et intéressant, quelque chose qui avait perdu tout effet extraordinaire à nos yeux, en privilégiant l’insinué puis l’inédit — paysage si insensé, univers si réussi.


Fondu au noir

Il finit de traverser la rue et respire, soulagé. Ses derniers pas ont été les plus angoissants. Un moment, à mi-chemin, il a cru qu’il n’y arriverait pas. Et pourtant il s’était lancé d’un pas décidé, en pensant aux mots du poète : « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux ». Maintenant il se réjouit en effet d’avoir jeté sa canne avant de bifurquer. Comme ça, personne ne pourra dire que si les voitures l’ont évité, c’était pour ne pas écraser un aveugle.


Micro-traduction de la micronouvelle et alourdissement de sa pré-critique de telle sorte qu’elles soient des anagrammes l’une de l’autre.