Accueil L’oulipien de l’année Diomira, une ville invisible
Charge

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En allant de là d’ahan et en fuyant huit nuits vers le graveleux
levant, l’homme est localisé à Domila, une vieille ville avec
quatre-vingts voûtes en vermeil, des statues de tantale des
trente dieux, des boulevards pavés couleur d’étain au soleil, un
théâtre en cristal trichrome, un chic chapon en argent qui chante
la chamade chaque jour chez un châtelain. Toute cette
somptuosité, le commis la connaît déjà parce qu’il l’a aussi
détectée dans d’autres districts. Mais la particularité qu’a
celui-ci est que quand on y arrive quand le soir tombe et qu’on
est en septembre, quand les jours raccourcissent et que les
lampes qui sont de toutes les couleurs s’allument toutes ensemble
à tous les MacDo qui ouvrent leurs portes, et que d’un balcon une
voix d’une cocotte crie : coucou !, en ce moment présent on en
vient à envier les vieux qui avouent avoir vécu auparavant une
veillée qui y équivaut et qu’ils avaient été à cette heure-là
plus qu’heureux.

Albino Calvino, « Les vils risibles » (Écueil), cacariture de
Gentil Baudet